Bangkok, gare de Hua Lamphong, tôt le matin. Objectif : acquérir un billet de train pour Chiang Mai. Jusque-là, aucun souci ! Mais pourquoi tant de monde ? Par familles entières, grands et solides sacs plastique rayés et colorés (les mêmes qu'à Ko Samui . Apparemment, ils remplacent nos habituelles bonnes vieilles valises), débordant de vêtements et de victuailles !
Guichet péniblement atteint, un fonctionnaire visiblement harassé nous répond qu'il est navré, mais qu'il n'y a plus aucune place de libre, ni pour aujourd'hui, demain et les deux jours suivants. Que ce soit en première, deuxième ou troisième classe. Normal, avec le Nouvel An chinois ! Nous ferions mieux de nous adresser à l'une ou l'autre des deux agences de voyage se trouvant dans la gare...
Naïfs que nous sommes ! Pourquoi n'y avons-nous pas pensé ? On le savait pourtant. Bien fait pour nous !
On se l'était pourtant promis, de ne plus jamais reprendre les cars pour touristes. Mais à moins de rester une semaine supplémentaire à Bangkok... On se retrouvait donc lestés, après passage dans l'agence qui nous avait paru la plus honnête, de deux billets de car VIP (encore !) pour Chiang Mai, distance 695 km. Départ ce soir, 18 heures. Compris dans le prix : un taxi au départ de la gare jusqu'au bus. Un ticket -repas. Un tuk-tuk à l'arrivée, demain matin 6 heures, pour nous conduire à notre hôtel. L'assistance sur place d'une hôtesse, travaillant en partenariat avec eux. On s'en repartait donc pour récupérer nos bagages, retour vers les 17 heures.
17 heures 30, en voiture Simone ! Taxi à l'heure, jusque-là, tout baigne. Dépose dans un quartier moderne à forte effervescence, énormes enseignes lumineuses, buildings et restos à foison. Toujours bon signe. Quelques pas pour s'orienter, habituels concerts de klaxon, la panique nous gagne. Des touristes comme s'il en pleuvait, au courant ou non de la procédure à suivre, cars sur le départ ou l'arrivée, gros numéros ne nous servant absolument à rien placardés sur leurs flancs poussiéreux, avec nulle part, écrit Chiang Mai !
De questions en attente, de déplacements en aiguillages divers, on se trouve enfin poussés vers le bon véhicule, toujours rien inscrit dessus, obligés de faire confiance. Chiang Mai ? Sawashtika ! A la grâce de Bouddha.
Finalement, on obtient confirmation définitive par l'autoritaire personne en tailleur et au luxe quelque peu outrancier qui s'empare de manière radicale de nos titres de transport. Bouche trop rouge, comme une saignée sur un visage à l'étonnante rudesse, un gabarit d'épaules, de mains et de pieds qui n'ont rien à voir avec l'habituelle gracilité des jeunes thaïs, de gros mollets qui auraient couru le marathon de New York, une voix profonde. Notre femme en tailleur et à talons longs comme un jour sans pain, est un trans ! No problem !
En Thaïlande, aucune curiosité mal placée ou comportement discriminatoire face à une sexualité qui s'écarte de la norme. On parle simplement de "troisième sexe".
Occulter le fait que le confort du car s'apparente tristement aux précédents, voyager de nuit reste intéressant. Multiples lumières en bord de route, lucioles qui signalent les commerces ouverts, habitations à l'étage. Soupes, riz, saucisses grillées ou autres, préparées sur les habituels réchauds. Mioches les yeux lourds de sommeil, affalés sur des chaises. Camions qui s'arrêtent sur les accotements ou carrément sur la piste du bord, pour permettre à leurs chauffeurs de roupiller.
Vers les dix heures, pause pipi et miam-miam. En échange de notre ticket-repas, une immonde soupe trop claire aux indéfinissables choses flottant en surface, du riz tellement épais que la louche reste plantée dedans et un soupçon de viande, qui n'a de viande que le nom ! Beurk !
"Si le menu prévu ne vous convient pas, vous pourrez demander à avoir autre chose", nous avait spécifié notre poupée maquillée. Tu parles ! Vexé par mon dédain face à sa cuisine ? En échange de mon ticket et malgré mes protestations, le patron de ce détestable troquet ne m'offrait qu'une canette de coca !
Retour sur mon siège, je la faisais durer tout en regardant les lumières défiler et en grignotant quelques biscuits. Restant de jours plus fastes, mis en réserve dans l'une des poches de mon sac. Je me rattraperais à Chiang Mai !
6 heures du matin et habituelles courbatures, nuit noire et tuk-tuk au rendez-vous, arrêt dans ce qui nous semblait la banlieue de Chiang Mai. Arrivée à notre hôtel, tuk-tuk réglé par avance comme convenu, la représentante de l'agence de Bangkok nous attendait. Jeune femme très compétente portant le nom de Noot, sympathique et organisées, qui nous emmenait dare-dare dans son 4X4 visiter d'autres hôtels, puisque celui-ci ne nous convenait pas. Lits trop durs !
Nous finissions par trouver notre bonheur, à deux pas de la vieille cité close dans ses murailles. Très bel établissement dans un jardin zen, bassin à poissons rouges, piscine sur le toit, personnel au petit soin dans de superbes uniformes en soie. L'un des artisanats de cette ville au charme fou.
En après-midi, noyaux de rues fermées à la circulation pour cause de week-end, nous découvrions un superbe marché. Objets et nourriture locale ou des environs. De quoi largement faire oublier à notre estomac sa récente déconvenue.
La pensée du jour : Rien ne sert de jurer ! Mieux vaut s'adapter aux circonstances. L'essentiel n'est-il pas de durer, tout en atteignant ses objectifs ? A l'irréalisable, nul voyageur n'est tenu !
Votre aguerrie Mme Torchon-à-la-main,
Ravie d'avoir échangé une longue route contre le calme luxueux de son nouvel hôtel.
Promis, mais pas juré, la prochaine fois, on prendra l'avion !
Illustrations : marché du week-end à Chiang-Mai : nourrir aussi son âme, articles pour Nouvel-An chinois
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